L’Homme perçoit trop souvent l’odorat comme un sens secondaire et peu important. Regardons ensemble pourquoi il est si précieux et apprenons à mieux le connaître. Les odeurs jouent un rôle crucial dans le comportement humain, elles peuvent déclencher des souvenirs, des émotions et des sensations. Dans notre vie quotidienne, l’odorat intervient pour nous permettre de détecter des dangers potentiels (odeurs de gaz toxique, de fumée, d’aliments avariés…), pour notre comportement alimentaire et notre comportement social. Alors qu’un parfum agréable peut avoir un effet calmant ou aider à se sentir mieux, les odeurs désagréables peuvent altérer notre humeur de façon négative et produire de l’anxiété et de l’inconfort. Mais alors, comment sont déclenchés de telles réactions ?
La communication par l’odorat
Notre environnement est riche de diverses molécules odorantes et phéromones. Oui, notre odorat est également sensible aux phéromones. Ce sont des molécules qui n’ont pas d’odeurs et qui jouent un rôle dans la communication entre des individus d’une même espèce.
Si nous prenons l’exemple d’une brioche sortie du four, son odeur est composée de plusieurs centaines de molécules odorantes différentes et volatiles. Ces molécules libérées dans l’air, vont voyager et pour certaines parvenir jusqu’à nos narines (voie orthonasale) ou depuis notre bouche (voie rétronasale). Leur détection et leur reconnaissance va ensuite se réaliser en plusieurs étapes, au sein d’un système cérébral précis que l’on nomme : le système olfactif.
Du mucus aux récepteurs olfactifs
Entrons dans le détail de ces différentes étapes :
Tel qu’évoqué précédemment, notre première rencontre aux odeurs a lieu lors de l’inspiration. Après avoir atteint les narines, ces dernières vont entrer jusqu’au fond de nos cavités nasales, logement de nos détecteurs olfactifs. C’est à ce moment-là, qu’elles seront solubilisées et retenues pendant quelques instants dans un mucus. Cette étape est très importante pour la suite, car les molécules olfactives ont chimiquement un rejet de l’eau. Cependant, le mucus est un milieu aqueux avec des protéines de liaisons appelées lipocalines. Sa composition va faire de lui un parfait transporteur et va également empêcher la saturation olfactive. Passez le doigt dans votre bouche : c’est humide et ça glisse, c’est un mucus.
Ce temps de rétention dans le mucus va permettre une détection des molécules par les récepteurs olfactifs. Ces derniers, présents à plusieurs centaines, se localisent à l’extrémité des neurones olfactifs. Chaque neurone ne produit qu’un seul type de récepteur. Ils sont renouvelables entre quatre à huit semaines, mais il peut arriver qu’un incident chimique ou biologique au niveau de ces neurones entraîne la mort de ces derniers. Par conséquent, notre capacité olfactive sera diminuée.
Comprendre comment reconnaître les odeurs
Il existe environ 5 millions de neurones olfactifs chez l’homme, 50 millions chez les lapins et environ 175 millions chez les chiens. Pour comprendre l’interaction entre un récepteur et une molécule odorante, il faut observer cette molécule de plus près. Celle-ci est composée de plusieurs parties, chacune reconnue par un récepteur olfactif. Imaginez-vous jouer à ce jeu de notre enfance, dont le but était de faire correspondre les formes géométriques dans leur emplacement attitré. C’est exactement le même système. Il faut se représenter les parties de la molécule possédant des formes géométriques bien distincts (ronds, carrées, …).
Ainsi, chaque type de neurones olfactifs exprimant chacun un type de récepteur, va pouvoir reconnaître une unique forme « géométrique » de la molécule. En revanche, il sera spécialisé dans cette forme et pourra la reconnaître si d’autres molécules olfactives la possède également.
Le chemin de l’information olfactive dans le cerveau
Ce mécanisme permet au système de détection d’être très flexible et de détecter plusieurs milliers de combinaisons molécule-récepteur. Une fois la combinaison formée à la surface des neurones olfactifs, les cellules des neurones olfactifs vont s’activer et envoyer un signal vers le cerveau. Les informations provenant de l’activation de ces cellules, vont parvenir jusque dans le bulbe olfactif. Ce dernier est également composé de neurones, qui ont pour rôle de lire l’information et de construire une identité pour chaque molécule odorante. Les neurones du bulbe olfactif envoient ensuite cette information vers les différentes structures du cerveau. On retrouve la perception sensorielle (cortex piriforme), la mémoire (cortex entorhinal et hippocampe) et les émotions (complexe amygdalien). Le chemin de l’information va se poursuivre vers le cortex orbitofrontal, où sera réalisée la perception consciente de l’odeur.
Le cortex piriforme va avoir comme mission, la reconnaissance des identités détectées précédemment. C’est lui qui va définir la perception odorante, par exemple celle de l’odeur de la brioche sortie du four. Cette odeur va ensuite être mémorisée par l’hippocampe. Cette étape va nous permettre de retenir les événements que nous vivons au jour le jour. En combinaison avec les autres sens, cette mémorisation va venir enrichir notre bibliothèque qui par la suite, nous permettra de se remémorer consciemment ou inconsciemment des évènements avec précisions.
Odeurs, émotions et mémoire
Enfin, nous avons évoqué une troisième structure en charge des émotions, il s’agit du complexe amygdalien (ou amygdale). Ce dernier va nuancer les événements que nous vivons vers une émotion positive ou négative. Toutes ces aires vont donc former un large réseau fortement interconnecté. Une fois l’information traitée par l’hippocampe, l’amygdale et le cortex piriforme, elle va passer vers une dernière étape, le cortex orbitofrontal. C’est le centre d’intégration où se fait la perception olfactive consciente.
Il nous faudra généralement moins d’une seconde entre l’entrée de l’odeur et la perception de cette dernière. C’est cette rapidité qui distingue le système olfactif des autres systèmes sensoriels. D’une part, l’information sensorielle ne va pas passer par le thalamus avant d’atteindre le cortex olfactif primaire. Et d’autre part, seuls deux ou trois neurones séparent les neurorécepteurs des régions cérébrales mentionnées (amygdale, hippocampe, …). Il existe donc un lien anatomique privilégié entre olfaction, émotion et mémoire.