Le grand public n’est pas forcément familier avec la notion de chémotype des huiles essentielles. Et pourtant, il s’agit là d’un facteur majeur dans la mise en place d’un protocole de soin en aromathérapie. Comment le chémotype influe-t-il les propriétés des huiles essentielles ainsi que leurs effets sur l’organisme ? Aroma Forest fait le point !
Le chémotype des huiles essentielles en aromathérapie
Une avancée importante dans le choix d’une huile essentielle en thérapeutique a été, pour une même espèce végétale, la classification des huiles essentielles en fonction de leurs composés chimiques majoritaires, qui détermine ce que l’on appelle le chémotype. Ce terme est également connu sous deux autres appellations : “le chymiotype” ou “la variété chimique”. Dans la nomenclature, ce terme se traduit par l’abréviation CT.
Il faut savoir que les molécules actives des huiles essentielles diffèrent potentiellement d’une plante à l’autre, même au sein d’une même espèce botanique. Or, ces composants aromatiques complexes possèdent des propriétés et caractéristiques différentes. Leurs effets sur l’organisme s’en révèlent tout naturellement différents voire divergents. Mais, seules les huiles essentielles qui montrent une variabilité significative dans leur composition, ont été classées avec un chémotype.
Prenons l’exemple concret du romarin (Rosmarinus officinalis). Dans l’expérience, nous allons comparer les propriété des huiles essentielles de romarin à deux chémotypes différents.
· Si on sélectionne un Rosmarinus officinalis CT cinéole, on va retrouver 38 à 55 % d’eucalyptol (1,8-cinéol) et 9 à 14 % d’α-pinène. Une composition qui en fait un expectorant et bactéricide important. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle il est appelé « Romarin cinéol ».
· En revanche, si on sélectionne Rosmarinus officinalis CT verbénone, on retrouve 4 à 14 % de verbénone et 15 à 40 % d’α-pinène. Une composition bien différente qui lui confère des qualités expectorantes également mais surtout antivirales et cicatrisantes. Il porte l’appellation courante : « Romarin verbénone ».
Le résultat est sans appel : une même espèce botanique, 2 profils chimiques et 2 utilisations différentes. En ce sens, il est essentiel de fournir une carte d’identité mentionnant les propriétés médicales et pharmacologiques de chaque huile essentielle. Le cas échéant, il devient impossible d’obtenir avec précision les résultats escomptés lors d’un traitement thérapeutique. C’est là qu’intervient le chémotype : il renseigne sur les molécules actives des huiles essentielles, leurs vertus et leurs effets sur l’organisme.
Chromatographie et chémotype des huiles essentielles
Comme nous l’avons précédemment établi, les huiles essentielles issues de la même variété de plantes présentent potentiellement des propriétés médicales et pharmacologiques différentes. D’où la nécessité d’en connaître le chémotype. Pour ce faire, il n’y a pas trente-six solutions. Il faut obligatoirement procéder à une analyse chromatographique afin d’identifier les molécules actives des huiles essentielles ainsi que leurs concentrations pour déterminer le composé majoritaire.
1. La première étape consiste en une analyse qualitative via une chromatographie en phase gazeuse. L’appareil sépare les molécules complexes qui composent l’huile essentielle en fonction de plusieurs facteurs. Il s’agit notamment de leur solubilité, taille, polarité, ou encore la présence de certains groupes d’atomes. Dans tous les cas, à la fin du processus, le chromatographe fournit un graphique caractérisé par une série de « Pics ». Or, chaque Pic correspond à une molécule aromatique spécifique. Le logiciel de l’appareil peut répertorier environ 450 molécules aromatiques différentes.
2. La seconde étape de l’analyse consiste à évaluer la concentration de chaque molécule active de l’huile essentielle. Autrement dit, il faut déterminer la composition quantitative des composants aromatiques via l’utilisation d’un spectromètre de masse.
Une fois toutes ces étapes accomplies, il est finalement possible de construire la « carte d’identité » de l’huile essentielle. Les informations ci-après sont alors disponibles sur le site vendeur de l’huile essentielle, avec comme illustration le cas de l’huile essentielle de Ravintsara.
· Le nom latin : Cinnamomum camphora CT 1,8-cinéole
· Famille botanique : Lauracées
· L’origine : Madagascar
· La partie de la plante utilisée : Feuilles fraîches
· Type d’extraction : distillation par entraînement à la vapeur d’eau
· Type de produit : huile essentielle 100% pure et naturelle
· Les composants aromatiques majoritaires : 1,8-cinéole (ou eucalyptol), sabinène, α-pinène
· Famille biochimique majoritaire : Oxyde terpénique (+56 %)
· Famille olfactive : Aromatique
Quels facteurs influencent le chémotype des huiles essentielles ?
Plusieurs facteurs influencent le chémotype des huiles essentielles. Mais dans l’ensemble, cette variabilité semble due à des spécificités génétiques et aux conditions géographiques, climatiques, pédologiques, saisonnières dans lesquelles les plantes ont poussé. Le climat, la nature du sol, l’altitude ou encore le pays, caractérisent le biotope sauvage de la plante. Ce biotope sauvage correspond à l’endroit où la plante s’est spontanément développée, s’adaptant aux paramètres environnementaux, développant ses défenses afin de survivre…
Pourquoi le chémotype d’une huile essentielle est-elle importante en aromathérapie ?
Le marché européen compte de nombreuses huiles essentielles diverses et variées. Grâce à leurs différentes vertus, elles sont en mesure de traiter plusieurs affections allant du simple rhume aux troubles du sommeil, en passant par le manque de tonus. Or, ces bienfaits sont largement attribués aux molécules actives, présentes dans les huiles essentielles.
Vous comprendrez alors qu’il est essentiel de définir la composition chimique d’une huile. Plus particulièrement, il faut s’intéresser à leurs propriétés et modes d’action. Après tout, si nous ne savons pas quels sont les principes actifs du produit, comment l’utiliser à bon escient ? Pour que le protocole thérapeutique fonctionne en aromathérapie, nous n’avons d’autre choix que de nous fier au chémotype des plantes utilisées.
Chémotype des huiles essentielles : une discipline normalisée
Si l’on se réfère à l’histoire, c’est Pierre Franchomme qui a posé les bases du chémotype des huiles essentielles. Ce chercheur français, expert en aromathérapie, attire l’attention sur les différentes propriétés des huiles en 1975. Plus précisément, il suggère et prouve d’ailleurs, qu’un produit issu d’une espèce végétale identique, n’a pas forcément les mêmes effets sur l’organisme. Il faudra cependant attendre plus de 30 ans pour que le chémotype soit normalisé. En effet, l’Union Européenne reconnaît officiellement l’existence d’une « race chimique » d’huile essentielle en 2006. C’est d’ailleurs pour cette raison que les produits sont contrôlés. Tandis que l’appellation « chémotype » est régulée par la norme REACH (Enregistrement, évaluation, autorisation et restriction des substances chimiques) qui sécurise la fabrication et l’utilisation des substances chimiques en Europe.
Comment choisir une bonne huile essentielle
Lors de l’achat d’une huile essentielle, il est important de prendre en compte plusieurs critères, afin de garantir la qualité et l’efficacité thérapeutique de celle-ci. Voici donc, quelques indications clés à considérer sur le flacon :
1 – Nom international
2 – Composition chimique / chémotype
3 – Origine géographique
4 – Partie du végétal utilisée
5 – Procédé d’extraction
6 – Profil chromatographique
7 – Fournisseur
Pour rappel, pour une huile essentielle extraite à partir d’une même espèce botanique, il n’est pas exclu d’avoir plusieurs chémotypes. Or, chaque profil chimique possède ses propres indices de toxicité et ses modes d’utilisation. La prudence est donc de mise.